Magic Madeira
Un climat subtropical en ultra périphérie de l’Europe, des paysages inouïs, des bananes et du vin… L’archipel de Madère, plus proche de l’Afrique que des côtes portugaises, est un concentré élémentaire de beauté naturelle: la terre, l’eau, l’air et le feu s’y côtoient dans une harmonie exquise et franchement relaxante. Une chance, après l’atterrissage sur l’une des pistes les plus dangereuses du monde à bord de votre coucou… Mais cette terre, d’apparence sauvage et menaçante car d’origine volcanique, se montre douce voire magique à la découverte de ses atouts. Bonne nouvelle…
La Terre
(…et la plage, oui oui)
À 1000 kilomètres de Lisbonne, Funchal, la capitale située sur la côte Sud de Madère concentre presque la moitié des habitants de la zone et bénéficie d’un micro-climat de douceur (À quelques kilomètres, on perd facilement 4 à 6 degrés). Agréable et accueillante, la ville est idéale pour s’immerger dans l’ambiance Fado (musique traditionnelle vibrante) et poisson grillé avant de partir en expédition!
Pour découvrir l’île, le plus pratique reste de louer une voiture car les reliefs achèveraient un cycliste de l’extrême. En moins d’une heure, par les voies expresses, toutes les bourgades sont accessibles et paraissent incroyablement pittoresques en comparaison de Funchal. Propulsé au fin fond du Portugal, le charme des différentes régions mérite un détour souvent surprenant: un téléphérique surgissant à flan de montagne, une gigantesque piscine naturelle, une forêt enchanteresse ou une vue à couper le souffle se trouveront sur votre périple tôt ou tard. Si vous empruntez les anciennes routes, le chemin est authentique mais plus long, parfois exigu et souvent obstrué par les chutes de pierre ou d’arbres, cela peut surprendre … c’est une question de chance 😉 (surtout avec une franchise de 1500 euros pour votre charmante auto)
Classée écorégion pour l’unique biodiversité qu’elle abrite, Madère est une terre dont l’exploration exige un certain entraînement… Une randonnée classée niveau débutant peut rapidement se transformer en épreuve olympique pour le quidam moyen (et même pour quelqu’un qui se croit sportif). Le long des typiques levadas (canaux d’irrigation de l’île), après quelques kilomètres d’escaliers de pierres à fort dénivelé (!), on peut ressentir une légère baisse de moral en croisant les « habitués » sautillant en tenue de combat, souvent sexagénaires. Dans un autre style, sur la pointe Est de Sao Lourenco, à flan de roche et sous un climat aride, la balade est saisissante. Mais pour atteindre la dernière étape, une préparation mentale est nécessaire pour oublier qu’il faudra se coltiner le retour un peu moins émerveillé, cassé, et face aux mêmes randonneurs au teint rosé. Mais rien ne vaut le bon duo vino verde (ou bière Coral) / sardines après l’exploit, et avant le petit plongeon en haute mer… du plongeoir d’une des piscines de l’île… ou d’une des plages à Madère, bien cachées certes, de sable noir, ça n’aide pas, mais très agréables, voire molletonnées tant les fonds sont doux…
L’eau
Dès la sortie de l’aéroport Christiano Ronaldo (!), c’est l’encerclement d’horizons aquatiques et l’appel des sardines grillées qui dominent tant le fond de l’air est marin. Bizarrement, l’impression d’îlot perdu au milieu d’un immense océan disparaît avec la douceur du climat et le calme des vagues. Direction Funchal, c’est plutôt la sécheresse et les séquelles d’incendies, notamment celui de 2016, qui sautent au yeux… Au cœur de la vieille ville, on est surpris de découvrir des accès à la mer surgissant de nulle part, où locaux et touristes se baignent allègrement dans une ambiance unique. Le long de la côte, on trouve des plages de galets, des piscines naturelles, de petits ports et des criques isolées, mais aussi des flans abruptes digne des plans cinématographiques, où les strates de roches révèlent des couleurs superbes. Géologie quand tu nous agrippes …
Avec quatre fois moins de pluies par rapport au nord de l’île, les régions du sud manquent d’eau, tandis que l’humidité et la bruine caractérisent les reliefs. En quelques minutes de voiture, on peut passer d’un café ensoleillé à une activité de haute montagne froide et brumeuse (le foehn pour les climatologues). Véritable afflux sanguin de l’île, le célèbre réseau des levadas a été rendu nécessaire pour compenser cette différence de précipitations dans l’île. Il s’agit d’un ingénieux système d’irrigation qui permet à l’eau de circuler dans les différentes parties de Madère. C’est aussi l’un des principaux attraits pour les visiteurs jusqu’aux randonnées dans les entrailles de l’île. Le long de ces petits canaux rempli d’eau claire, on parcoure des kilomètres dans la forêt à la recherche de … du bonheur de faire du sport. On débouche alors sur les 25 Fontaines ou sur une cascade géante, puis l’on rebrousse chemin en espérant croiser le moins de touriste possible… car dans certaines parties de la balade, c’est eux, vous ou la chute ! Dépaysant, non?
L’air
Une brise marine permanente évite la sensation de canicule lorsqu’on déambule dans les villes qui fleurent bon le poisson (le cocktail sabre/banane grillée est la spécialité),… plaisante sensation. Plus en hauteur, à Funchal, on aperçoit très souvent une chape de nuages plombante scindant clairement le ciel bleu qui laisse présager d’un climat changeant tout autour de l’île. L’effet de foehn qui correspond à la rencontre entre des vents forts et les montagnes environnantes est impressionnant. Cela donne envie de rester à l’abri en terre urbanisée pour bronzer à la fraîche, arpenter le marché des Lavadores ou manger à Camara de Lobos, ville adorable aux alentours de la capitale.. mais Madère, c’est le goût de l’aventure et l’envie de changer d’air, j’avais signé! En roulant quelques kilomètres pour rejoindre une randonnée, quelle que soit votre destination, l’ile surnommée « le poumon de l’océan » titillera vite votre souffle. Puis arrivé au pic Arieiro, vous aurez peut être la chance de dépasser les nuages pour arriver au 8ème ciel… ou alors de rester dans le coltard le plus total car le foehn est trop dense, question de fortune encore une fois…
Madère est dans l’air du temps… véritable réserve naturelle, accessible à des tarifs modérés, offrant activités décapantes comme paysages stupéfiants, vous y croiserez autant d’anglais, d’allemands et de français que de portugais. Les autochtones restent pourtant flegmatiques et souriants face à l’afflux de visiteurs. Bien qu’insulaires dans l’âme, les locaux savent recevoir et baragouinent facilement quelques mots de votre langue pour vendre leur produits (tous les menus sont trilingues au minimum). Et comment refuser un petit verre de Madère au soleil en si charmant pays ? Cet archipel tend à éveiller les consciences tant le fragile mais parfait équilibre de la nature s’y exprime; les jardins aux couleurs tropicales, les denses forêts de dessins animés, les accès maritimes inédits, les décors qui changent au gré des vents, interpellent forcément. La puissance aussi, domine les sensations qui émanent de territoire. On sent qu’à tout moment, le vent peut tourner 🙂
Le feu
En été 2016, justement, comme souvent dans l’île, le mix de vent violent et de soleil intense a provoqué de forts incendies dont les répercussions sont visibles dès le hublot de votre coucou, ou en prenant le fameux téléphérique qui survole Funchal (Plus de 150 habitations ont été brûlées). Cela donne une impression un peu « dark » qui contraste avec la beauté au sol. D’une manière générale, cela impacte l’architecture environnante, avec pléthore de bâtisses désaffectées presque encore fumantes, entourées de magnifiques demeures et hôtels avec piscine. En voiture, pour rejoindre la superbe point de vue de Cap Girao par exemple, on est stupéfait du nombre d’habitations délabrées et de parcelles naturelles noircies par le feu. On ne peut s’empêcher de penser que la reconstruction sera longue dans une île qui ne vit que du tourisme et l’agriculture. Notons en passant que la production de bananes semble être un véritable culte à Madère…des terrains entiers de bananiers entourent les routes pour produire les bananes grillées qui accompagnerons votre sabre fraîchement pêché, une spécialisé locale un peu farineuse à mon goût mais qui a le mérite d’être bourrative…
Et lorsque l’on arrive à saturation de produits de la mer: sardines, daurade, truite, sabre, saumon, moules, morue, poulpe … ce que je ne croyais pas possible… mais si ! … on peut partir en quête d’un barbecue de grillades ou brochettes de viande ou de poulet qui font le charme des nombres de petits restaurants tout autour de l’île. En la matière, il ne faudra surtout pas rater les pierrades de Leono’s, situé à l’ouest de Funchal dans un quartier moderne et touristique, l’un des meilleurs repas carnivore de ma vie. Enfin, pour profiter du soleil sans faire d’effort, vous pourrez prendre le large et faire bronzette dans la plus belle plage de ce coin de l’Atlantique, Porto Santo, accessible en bateau au départ de la capitale. Avec un climat semi-aride, elle est une parenthèse ensoleillée dans un séjour ébouriffant, avant de rejoindre les tumultes du continent.